Villa Séraphin (extraits)

C'est le plaisir de l'attendre qui prolonge ses jours, plus encore que celui de la méditation devant une boisson, suivant le cours des saisons un sorbet, une mousse au chocolat chaude, un sablé au citron, à l'orange, à la lavande, quelquefois jadis l'ambiance était telle qu'il fallait inventer des jeux de salon ou lire à haute voix, elle lisait encore à haute voix il n'y avait pas si longtemps,  Portrait d'un inconnu ou le Planétarium, et quand ils baillaient elle consentait à ébrécher un passage de Proust, l'autre dessinait, elle cousait,  ses parents enterrés avaient laissé la place à d'imaginaires petits neveux,  Ségur ou Robinson Crusoé précédaient  Tarjei Vesaas, Le coeur est fendu et ne sait ce qu'il veut, ainsi commençait  La barque le soir, qui lui rappelait un tableau de Corot,  Le soir sur l'étang  (1871) où une femme n'apparaissait au bord de l'eau que  juste avant la nuit, couleur d'ombre déjà et nimbée d'or pâle, comme une planète délaissée par le soleil, cette lumière ne lui était pas destinée, elle la recevait par hasard, l'onde lumineuse se faufilait sous les herbes les plus hautes, rectifiait l'alignement des peupliers qui protégeaient les abords de l’étang