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Extrait de la Femme des petites provinces, opus 2. Paru chez Conre-pied en mars 2014

 

 

Revenir à l'origine des mots. Continuellement ramène à l'origine de soi. Recentre ce qui s'ébahit. L'élargissement du sens induit une crispation idéologique d'où l'on ne peut partir qu'en reprenant l'histoire à son origine. Sinon il y a engluement. Toute signification sémantique crée une zone de sables mouvants, glaiseuse, qui entraîne la mort de l'homme avec celle du mot. Leur trace subsiste comme celle de dinosaures empreints. Reste la carcasse embrouillée, et ces émouvants inserts que sont les moulages de pas. Ce qui reste de l'oiseau volant par excellence, l'aléa de quelques pas sur une terre argileuse, sur du ciment frais. Quand bien même aucune plume ne persisterait. Malgré le nombre d'individus traversant les airs, le seul témoin de cette descente fortuite et de ce piétinement vers une miette, un insecte. Un insecte fossile. Une trace prouvant une autre trace. Tout ceci disparu dans l'instant. Sauf cet oubli pathétique, cinq, quatre doigts, trois doigts.

Rien n'est compatible avec la poésie. "Le jour ne se lève pas, ni la nuit ne tombe, ni l'un ni l'autre ne correspondent aux notions de jour et de nuit qui se balancent là-haut sur la colline, hors du puits où leur alternance bascule la raison."

Quand elle entre ou sort du café personne ne la rejoint, pas même vous, elle jette un regard autour d'elle pour voir si on la suit, si on l'a remarquée. Elle est à la fois entièrement indépendante et complètement insérée dans cette ville de tous les jours, avec ses mœurs désuètes, ses harcèlements sonores et les affiches mille fois arrachées et recollées qui racontent la modernité depuis cent ans.