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DERNIERES HUMEURS : EAUDITIVES 2014 BRIGNOLES PLAINE PAGE

 

Je reviens de la 6° édition du Festival des Eauditives à Brignoles, ville de fontaines largement sous-estimée par les voyageurs qui y trouveraient des ruelles pentues non commerçantes, de jolies places et l'ombre des arbres, une belle et bonne librairie, le Bateau blanc, et des cafés sympas. Tout ce que nous regrettons par exemple à St Paul de Vence !!!

 

Le Festival des Eauditives est une manifestation organisée par les éditions Plaine Page. Eric Blanco, écrivain et Claudie Lenzi artiste plasticienne, assistés de Cédric Lerible, poète, associent les pratiques artistiques aux travaux des écrivains qu'ils publient. Ils créent les conditions d'un dialogue et suscitent, par leur intelligence, leur humanité, leur savoir-faire, des œuvres croisées. Poètes et élèves de la 1ère année de l'Ecole Sup d'Art Toulon Provence Marseille, dont le Professeur Patrick Sirot est également performeur, se sont rencontrés, écoutés et regardés les uns les autres avec une même soif de découverte, un même plaisir à improviser des actions communes. Sous la pluie intermittente du spectacle.

 

On pourrait ne venir au Festival que pour son ambiance chaleureuse, l'attention que nous portent les organisateurs. On pourrait y venir pour le plaisir d'être présenté par Micheline Simon, quand elle rassemble Raoul Hébréard, Karine Huet et Hervé Brunaux autour de la notion de voyage les interrogeant sur le signe, la limite, l'extrémité.

 

 

Ou bien pour l'exercice que nous propose Yann Nicol, avec un talent exceptionnel, de confronter des pratiques, des techniques, l'intrusion d'autres modes d'expression comme le cinéma, la manière dont le temps présent (le fait divers, le moment de l'écriture), passé (le surgissement du souvenir, l'absence, le trou) et le futur (le projet, la contrainte, la réponse par le livre) conduisent l'écrivain à inventer leur matériau, à se déplacer. C'est ainsi que la guerre du Liban (Ritta Maddoura), un massacre en Alabama (Franck Smith) posent la question de l'utilisation d'un fait spatio-temporel. Comment passer du particulier à l'universel par le maniement de la langue, la puissance du rythme.

 

 

Un arbre à thé sur la place. Des fils. Des sachets de thé. Des étiquettes. Du vent et de la pluie. Des sachets de thé au bec de la fontaine. Des senteurs dont on vient s'abreuver par osmose. Des étudiants masqués de longs cônes blancs, porte-voix, nez de médecins au théâtre, hennins, attributs vénitiens, lentement déambulaient entre les mots des poètes, chuchotant aussi ou hurlant pour annoncer le spectacle. L'eau déclinée, travestie, enfermée dans divers bocaux, on lave de la vaisselle à la fontaine on l'essuie sous la pluie. On apprend à résister aux éléments. On n'écoute que son projet. On se mouille pour de vrai. Les étudiants inventeurs-praticiens dès leur première année ont proposé des travaux très divers. Dont une performance pour laquelle l'un d'eux créait une pièce sonore et son compère plongeait par apnées successives son visage masqué mais sans tuba dans un bocal coloré. Contrôle de la durée, du rythme. Ce que même des artistes confirmés parfois ne réussissent pas.

 

Les lectures des poètes. La récurrence de la répétition. Le mot "boum" est le mot fétiche. On le prononce, on le hurle. La contrainte temporelle oblige le poète à mieux servir son texte. La durée est la grande faucheuse. Le bruit ne fait pas le succès et parfois oblitère le sens. On peut confronter en l'ayant en mains ce qui se lit à ce qui se dit. On ressent à sa voix la timidité du poète. Celle qu'il éprouve quand il se trouve face à sa poésie. On est toujours heureux de percevoir un souffle inconnu. Il nous semble toucher l'origine du texte. Le moment intime où pour la première fois dans la gorge de l'écrivant se forme la phrase phonétique

 

Coralie Barthélémy, l'attachée de presse du Festival, avait en amont eu des entretiens d'une minute 30 pour Radio Verdon avec les écrivains invités. Cet exercice subtil de présentatioon des livres, est audible sur You tube en cherchant Eauditives. Je crois qu'elle a d'autres projets en ce sens et j'en suis déjà curieuse car elle mène ses entretiens avec discrétion et qu'elle s'intéresse à la pratique de l'écriture.

 

 

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